Entretien avec Nicolas Nord, secrétaire général de la CIEC

Créée en 1948/1949, la Commission internationale de l’état civil (CIEC) est une organisation internationale basée à Strasbourg. Son secrétaire général de la CIEC, Nicolas Nord, répond à nos questions.


Quels sont les objectifs de la CIEC ?
De manière générale, l’objectif de la CIEC est de faciliter la coopération internationale en matière d’état civil et de favoriser l’échange d’informations entre les officiers de l’état civil. Il s’agit d’une organisation internationale au sens classique du terme, mais également d’un forum au sein duquel les questions relatives à l’état civil, compris largement, sont étudiées et discutées.

Comment intervenez-vous ?
Les modes d’intervention sont divers. En premier lieu, la CIEC élabore des recommandations et des conventions en matière d’état et de capacité des personnes, de droit de la famille et de droit de la nationalité. Une fois adoptés, ces textes et leur mise en œuvre nécessitent un suivi. Des difficultés d’interprétation peuvent apparaître. Des résolutions interprétatives peuvent alors être adoptées par l’Assemblée générale. En deuxième lieu, la CIEC fournit des renseignements aux autorités des États membres, d’ordre juridique ou pratique, comme la mise en relation avec une autorité étrangère lorsqu’une question se pose à propos d’un acte établi par l’une et présenté à l’autre. En troisième lieu, la CIEC organise elle-même des colloques et participe à des événements du même type organisés par d’autres organisations internationales, des ONG ou des universités.

Pourquoi l’état civil est-il un enjeu primordial ?
L’expression « état civil » recouvre au moins deux réalités. D’une part, elle renvoie à la situation juridique de la personne, de sa naissance à sa mort. D’autre part, elle désigne l’ensemble des services publics chargés de la création, de la mise à jour, de la délivrance et de la conservation des actes relatifs à l’état des personnes. Il est facile de comprendre qu’il est crucial pour un individu de démontrer sa situation dans diverses circonstances : pour s’inscrire à l’école, acheter un immeuble, faire valoir ses droits dans une succession, se marier, … La preuve est facilitée si le service de l’état civil fonctionne de manière satisfaisante.

Pouvez-vous donner des exemples d’actions qui ont permis de faire avancer la gouvernance de l’état civil ?
Elles sont nombreuses puisque la CIEC existe depuis plus de soixante-dix ans. L’exemple le plus significatif est celui des formulaires plurilingues. Il s’agit de modèles d’actes, annexés aux conventions, qui permettent de contourner la difficulté, classique au niveau international, de la traduction des documents. Concrètement des formulaires-type sont établis. Ils comportent la traduction des différentes mentions de l’acte dans les langues officielles des États parties. Dans les conventions les plus récentes, cette méthode a été perfectionnée par le système du codage qui consiste à assortir chaque mention figurant sur les formulaires-type d’un numéro. L’ensemble de ces énonciations et numéros sont compilés dans un lexique qu’il suffit de consulter pour pouvoir comprendre l’acte.

Depuis plusieurs années, les relations entre la CIEC et l’Association du notariat francophone se sont renforcées. L’ANF regroupe 28 pays membres. Quel rôle l’ANF peut-elle jouer dans le renforcement de l’état civil ?
L’ANF, par son rayonnement international et son dynamisme, a la capacité de sensibiliser les États sur l’importance de se doter d’un état civil efficace ainsi que sur la nécessité de procéder à des régularisations, notamment pour les personnes dépourvues d’actes de naissance. La collaboration entre l’ANF et la CIEC est donc logique puisque les préoccupations des deux organisations sont proches. Un cap pourrait être franchi : l’ANF pourrait devenir membre à part entière de la CIEC et participer à l’ensemble de ses travaux. L’expérience pratique des notaires de l’ANF serait notamment bénéfique dans les groupes de travail que nous mettons en place.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Nos projets sont nombreux. Nous travaillons notamment sur la traduction de nos conventions. Elles ont toutes été établies en français. Nous disposons depuis peu, pour certaines d’entre elles, de versions officielles en anglais et en portugais. Nous souhaitons poursuivre le mouvement pour l’ensemble des conventions et nous ouvrir à d’autres langues encore, l’espagnol en particulier. La convention n°34 est entrée en vigueur le 1er juillet 2022. Nous œuvrons à la diffusion de ce texte et déployons des efforts pour que le plus grand nombre d’États y adhérent. Nous cherchons également à moderniser certains de nos textes afin de les adapter le plus possible aux nouvelles réalités, qu’elles soient sociales ou technologiques, par exemple la dématérialisation des actes de l’état civil. Nous serons donc amenés à élaborer de nouvelles conventions dans les mois qui viennent.

En savoir plus :
Commission internationale de l’État civil : https://www.ciec1.org